Si vous répondez oui à au moins l'une de ces questions, vous ne pourrez malheureusement pas entrer sur le territoire des Etats-Unis d'Amérique. Flashback.
Pour rappel, je suis allé à l'université de Cornell avant tout pour faire un stage en laboratoire de recherche. Il y a 31 types de Visa de séjour temporaires disponibles. La première difficulté est de savoir lequel choisir. En théorie j'aurais dû prendre le J - pour les stages -, mais le F s'appliquait du fait d'un changement un peu subtil de statut - visiting student.
Il faut s'y prendre plusieurs mois à l'avance pour espérer avoir un Visa. Comme je suis quelqu'un d'organisé, de serein et de prévoyant, j'ai jugé plus utile de m'en occuper à partir de décembre. Pour un départ prévu le 19 janvier. Quelques petites choses à faire ou à avoir avant :
- Prendre rendez-vous sur le site de l'ambassade en achetant un PIN pour $14 qui ne fonctionnera que deux fois : pour un premier rendez-vous, et pour déplacer le-dit rendez-vous si la date ne convient plus. Rendez-vous pris le 3 janvier. Checked.
- Une photo récente - moins de 6 mois. Certains vont chez le photographe et payent une blinde pour ça. Sur leur site ils précisent qu'on peut prendre les photos soi-même ; quitte à faire des économies... Le principe est d'avoir les cheveux derrière les oreilles - ça, ça m'a pas trop posé de problèmes - et d'avoir une tête neutre. Elle doit aussi avoir une taille précis, un poids précis et un format précis (détaillés sur le site de l'ambassade) et ne pas être retouchée - eh oui il faut vivre avec sa tronche, triste époque. Sur le site du DS-160 un petit logiciel permet de dire si la photo est correcte. La mienne l'était. Ouf. Checked.
- Le DS-160 : le formulaire de non-immigration. On ne veut pas de vous aux USA, et on essaie subtilement de vous le faire comprendre. C'est à ce moment là qu'on se rend compte qu'il y a beaucoup d'identifiants sur les cartes d'identités et passeport et qu'apparemment on a une vie passionnante, ou suffisamment passionnante pour qu'on nous demande autant de détails à propos d'elle. Mieux qu'une séance chez le psy. Mais pas checked, parce que pour le terminer on a besoin du...
- I-20 : délivré par l'université, il complète le Visa pendant notre présence sur le territoire de l'oncle Sam pour assurer pitance et sécurité. Comme je m'y suis pris bien en avance, j'ai réussi à envoyer tous les papiers nécessaires pour l'avoir le 22 decembre. Les vacances tombaient le 23. Jusqu'au 5 janvier. Damned, c'est mort pour le 3, merci le PIN, nouveau rendez-vous le 10 janvier ! Le I-20 est nécessaire pour compléter le DS-160 et payer les frais de Sevis.
- I-901 : les frais de Sevis. Le papier le plus rapide à faire, étant donné qu'on ne nous demande quasiment que notre numéro de carte bancaire. Et hop, $200. Checked. Enfin presque. J'ai reçu le I-20 le 8 janvier - checked -, et j'ai payé les frais de Sevis directement. Sauf qu'en petit il est marqué : you MUST pay your sevis fee at least 3 business days BEFORE your appointment. Mise à part qu'on dirait qu'ils nous crient littéralement dessus, j'étais en dessous des trois business days... Sera-ce un problème ?
- Reste à terminer le DS-160, payer une centaine d'euros par mandat-compte à la poste, amener une enveloppe Chronopost, ne pas oublier la lettre d'acceptation à l'université (différent du I-20), avoir un papier justifiant de 15000€ disponibles pour le séjour délivré par la banque, et enfin un papier justifiant que l'on va revenir en France après cette période - ils n'ont vraiment pas envie qu'on reste. Checked.
Ensuite, on arrive à l'ambassade et on se rend compte qu'il faut passer une sécurité, comme à l'aéroport. Comme à l'aéroport, on se dit qu'on aurait dû prendre beaucoup moins de choses métallique. On se rend aussi compte qu'être à complètement à la bourre a stimulé à un niveau sans précédent notre organisation et prévoyance : "Pourquoi vous avez trois calculatrices dans votre sac ?" "Oh, ça c'est la prépa... S'il y en a une qui tombe en panne... Vous comprenez... La sortie, c'est par là ?".
On remballe tout, pendant cinq minutes. On prend un ticket. On a un numéro, B210. Il y a un tableau affichant trois numéros qui fait bip quand ça change et qui indique le bureau où on doit se diriger pour le rendez-vous. Bip, D213 - 20. Bip, B209 - 13. Bip, C214 - 12. Bip, B205 - 23 - à ce moment là on se demande s'ils ont pas mis le compteur en mode aléatoire. Je ne dirai rien sur le moment où l'afficheur plante et bipe le même numéro toutes les secondes.
Bip. Bip. Bip.
Bip, B210 - 5. Bonjour madame derrière la vitre, je vous donne un peu tout, dans mon enveloppe Chronopost, comme indiqué sur la feuille que j'ai eue à l'entrée. Vous n'êtes pas très bavarde. Ça vous arrive de sourire ?
Empreintes digitales des quatre doigts de ma main droite, puis gauche, puis les deux pouces, puis empreinte des pieds et scanner rétinien. Vous avez de beaux yeux, monsieur.
Retournez vous asseoir, on vous rappellera.
Bip. Bip. Bip.
Bip, B210 - 15. L'homme a un fort accent américain. Je lui demande s'il n'y a pas un problème pour le Sevis, il me répond "Non c'est pas gwave, ça a l'aiw d'êtwe twaité pas two mal, oh yeah baby !". Three business days, qu'ils disaient, avec un gros MUST. Et vous ne voulez pas de mes autres papiers ? Pas besoin ? Ni la photo ? Vous pourriez l'accrocher sur votre vitre, regardez, là, comme ça, ce serait très joli ! Non ? Bon, tant pis...
C'est à ce moment que le stress atteint son niveau maximal - ou plutôt atteint le niveau qu'il peut encore atteindre quand on pensait avoir plafonné au niveau maximal depuis plusieurs heures. Il y a tellement de formulaires à remplir, de papiers à obtenir, que l'on se dit jusqu'à la dernière minute : "Il va me manquer le D-57... Ou le B-210... Attends, c'est quoi déjà B-210 ? Et est-ce que je me suis pas trompé en mettant mon nom sur le DS-160 ?... J'aurais pas dû enlever ce bouton sur Photoshop ; il va le voir, c'est sûr, c'est sûr ! Tiens, un moustique. Quelle grâce dans le vol, quel...".
L'homme derrière cette barrière de verre tient entre ses mains la dernière clé pour atteindre le pays tant désiré. D'un seul geste, il pourrait balayer nos espoirs et nous renvoyer dans notre niche la queue entre les jambes. On se sent comme un candidat de Fort Boyard qui regarde le petit écran au dessus de la porte pour voir si son coéquipier va réussir l'épreuve à temps, et on a envie de crier "Sors ! Sors ! Sors !" mais on ne le fait pas parce qu'on n'est pas encore devenu complètement fou, quand même, faut pas exagérer.
Bip. Son regard va de son ordinateur à nos papiers.
Bip. Il vérifie le Visa.
Bip. Regarde son ordinateur.
Sors !
Bip. Nous regarde.
Bip.
"Okay, vous le recevrez dans deux-trois jours, bonne journée !"
Avec le sourire.

Manger des huitres ? xD
RépondreSupprimerLes huitres sont vivantes, pour un americain c'est un crime sans nom...
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